alcoolisme

Le confinement nous rend-il alcooliques ?

Publié le 24 mars 2020 à 15h55

Modifié le 24 mars 2020 à 22h40

par Sarah Leris

Avant le confinement, 40 % des Français prenaient l'apéro au moins une fois par semaine, pour une consommation moyenne de 2,7 verres par jour et par personne (source : Statista). S’il n’existe pas encore de chiffres sur la consommation d’alcool en période de confinement, nul besoin d’être Einstein pour le remarquer : on boit, beaucoup.

L’alcoolisme social est synonyme de convivialité ; « on boit un verre ce soir ? » était l’une des phrases les plus prononcées dans nos vies pré-confinement, et pour des retrouvailles entre amis, pour un anniversaire ou pour souffler après une journée de boulot, tout prétexte était bon pour un petit godet. Des prétextes qui n’ont pas disparu avec le changement de mode de vie, et qui ont même empiré si l’on en croit les stories de ceux qui sont désormais adeptes des visioconférences entre amis.


Apéro à la maison ce soir ?

Car pour pallier le manque de soirées, de copains et de verres en terrasse, la solution fut vite trouvée : les apéros Skype (certains utilisent le mot coronapéro et ma rédactrice en chef parle de Skypéro, mais je me refuse à utiliser ces mots, pardon Rachel). Ni une ni deux, on n’était pas confinés depuis 48h que la majorité des moins de 35 ans étaient déjà en visio avec une bande d’amis, un verre à la main, comme pour nier l’indéniable : on est enfermés, on est loin les uns des autres, et on ne peut pas se voir. « Il faut bien trouver un moyen de continuer à voir ses amis, je meurs si je ne les vois pas ou ne leur parle pas pendant deux mois », explique Clara, 25 ans. La Parisienne, enfermée avec son mec dans un studio de 30 m2, essaie de garder un rythme semblable à sa « vie réelle ». « Je m’interdis de boire le dimanche et le lundi. Après je pense que je bois moins d’un coup mais beaucoup plus sur la durée, quand avant je ne buvais que le week-end, là j’ouvre la bouteille de rouge dès le mercredi soir. Au début House Party c’était juste pour garder contact, et puis on a ouvert la première bière et c’était fini, maintenant on est pompettes à distance… sans forcément se mettre de grosse cuite, heureusement. C’est drôle, on a l’impression d’être tous ensemble, même si le lendemain matin ça me fout le cafard de penser que je ne vais pas les voir en chair et en os avant longtemps. »

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Elle n’est pas la seule à faire face à la déprime, si l’on en croit une enquête chinoise réalisée pendant le confinement qui montre qu’il a entraîné un stress psychologique chez 35 % de la population. Dans une interview donnée à France Culture, la psychologue Catherine Tourette-Turgis explique qu'en période de confinement, les individus entre 18 et 30 ans sont les plus touchés par la détresse psychologique. Pire : un confinement qui durerait plus de dix jours pourrait causer des syndromes de stress post-traumatique. Alors forcément, on boit pour se sentir proches les uns des autres, mais on boit aussi pour oublier, pour se remettre de ses émotions, pour accepter la situation. C’est le cas d’Alan qui, à 23 ans, se retrouve confiné seul dans une ville qui n’est pas la sienne et dans un appartement qui n’a pas de box Internet, loin de ses amis, loin de sa famille. « Depuis le début du confinement, quelque chose a changé. J'ai eu besoin d'une bière devant le discours de Macron pour faire passer la pilule puis d'un shooter pour accepter. Et depuis, les e-apero en facetime s'enchaînent le soir, seul moyen pour moi d'apercevoir des visages aimés et réconfortants. »


Boire seul, la nouvelle norme

« Bien qu'étudiant puis jeune actif amateur de soirées alcoolisées et jamais en reste pour boire, je me suis toujours refusé à boire seul, continue Alan. Même une simple bière l'été. Cela permet de séparer radicalement ma consommation de fêtard quand je suis avec mes potes et celle, réduite à néant donc, quand je suis seul et de préserver un minimum mon foie. » Car jusqu’à récemment, l’alcoolisme social était répandu et accepté justement parce qu’il permettait de sociabiliser. A contrario, le fait de boire chez soi renvoyait vite au cliché d’un vieil alcoolique s’enfilant plusieurs bouteilles seul chez lui, un tabou considéré comme plus grave, comme si l’alcool prenait en compte le fait qu’on soit seul ou accompagné au moment de l’ingérer. En période de confinement, l’image s’applique à chacun de nous qui ouvrons une bière en FaceTime. Une image dépoussiérée : nous voilà tous devenus des "vieux alcooliques au nez rouge".

Or, les bonnes comme les mauvaises habitudes se prennent rapidement. « Au final, une fois la bouteille de rouge ouverte, il est agréable d'en boire un verre en mangeant le lendemain puis pour se réconforter devant un film, seul depuis une semaine. Tout comme la petite bière fraîche à 19h pour observer le jour décliner. Rien de grave certes, mais c'est là un changement important tout de même. » Quand il essaie de calculer sa consommation quotidienne, Alan fait une pause pour réfléchir. « 2 verres de vin par jour, souvent une bière aussi et 3-4 shooters de limoncello ou de rhum le soir devant ma télé. Et s’il y a apéro, ça peut monter à une bouteille. » Une consommation d’alcool multipliée par 2, voire 3, pour lui qui ne buvait qu’à certaines occasions avant le confinement.

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« Boire seul devant son écran, on est tombés bien bas non ? »

Dans chaque combat, on trouve quelques résistants. C’est le cas de Gaëlle, 30 ans, pour qui le confinement a ça de bon : plus besoin de consommer de l’alcool. « J’avais prévu de ralentir ma consommation d’alcool, là je peux tout simplement l’arrêter. Plus besoin de me forcer à boire pour sociabiliser, l’alcoolisme mondain n’existe plus et j’en suis ravie ! Honnêtement, boire seul devant son écran, on est tombés bien bas non ? Et puis se taper une gueule de bois en confinement, l’angoisse… Heureusement je suis confinée seule, j’admets que ça joue sur la motivation, sinon j’aurais sûrement eu envie de partager une bonne bouteille avec la personne avec qui j’aurais été enfermée» La jeune femme, qui buvait pour voir ses amis, pour se sentir proche d’eux, pour avoir une bonne raison de se poser en terrasse, avait déjà essayé de suivre un Dry January mais n’avait pas tenu la pression sociale. Une question qui ne se pose plus pour elle. Et elle n’est pas seule : Gaëlle a passé un appel sur les réseaux sociaux grâce auquel elle a regroupé des dizaines de personnes qui font l’expérience d’un confinement zéro alcool. « J’avais l’impression d’être la seule dans mon entourage à ne pas boire en cette période de confinement, là on se sent moins seuls, on se serre les coudes. »


L’alcool comme compensation sociale

Et après ? Qu’adviendra-t-il de notre consommation d’alcool le jour où tout redeviendra comme avant ? « Je ne sais pas si ça reviendra vraiment à la normale après ça, avoue Clara. Les habitudes ont la vie dure tout de même, surtout qu’on va avoir envie de sortir comme pas possible quand on en aura enfin le droit. J’imagine déjà la teuf qu’on va faire ! » S’il n’a fallu que quelques jours à certains pour se sentir déjà condamnés à l’alcoolisme, d’autres, comme Alan, parviennent à se rassurer. « Je ne pense pas que je continuerai sur ce rythme en ressortant. Là c'est une sorte de compensation sociale, un peu à l'instar du chocolat. »

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