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Transracialisme : un influenceur blanc se fait opérer pour ressembler à un coréen

Publié le 29 juillet 2021 à 16h00

par Manon Merrien-Joly

Au mois de juin, (mois des fiertés dans le monde entier, dédié à célébrer et faire reconnaître les droits des personnes LGBTQI+), Oli London, influenceur et chanteur britannique qui se présente comme une "star de la K-pop et personnalité de la télévision" faisait son coming-out sur sa chaîne Youtube en tant que personne "coréenne non-binaire". 

Le 21 juin, iel publiait une vidéo "je suis coréen non-binaire..." sur sa chaîne youtube. "Qui que vous soyez, peu importe à quoi vous vous identifiez, à une pomme de terre, un schtroumph, un prince Disney... Nous avons le droit de de nous identifier de différentes façons, explique Oli London. Donc que vous vous identifiiez à un lapin, un chat, un chien, ce n'est pas le sujet. La question c'est qu'en tant qu'êtres humains, la plupart d'entre nous - pas tous - vivons dans des démocraties où nous pouvons nous exprimer. Je crois vraiment en la liberté d'expression." 

"Plastic is fantastic"

Dans une vidéo publiée le 26 juin intitulée "être coréen...", iel explique avoir eu recours à 18 opérations de chirurgie esthétique. London a choisi de se faire opérer pour ressembler à son idole, le chanteur sud-coréen Park Ji-Min du groupe BTS, dont il a aussi repris le prénom. En tout, il aurait dépensé plus de 100 000 euros. En 2020, Oli London s'était marié à une réplique en carton de Park Ji-Min à Las Vegas, déclarant vivre "le jour le plus heureux de sa vie"Le 1er juin dernier, il dévoile un single "plastic is fantastic", prônant la liberté de faire "ce que l'on veut" dans un monde de "faux-semblants". 


Oli London n'est pas le premier à revendiquer une identité raciale différente de son origine ethnique de naissance. Ce phénomène baptisé "transracialisme", a été particulièrement médiatisé par Rachel Dolezal, une américaine blanche qui s'est faite passer pour noire pendant plusieurs années, jusqu'à être présidente d'un chapitre de la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP) dans l'Etat de Washington, une organisation américaine de défense des droits civiques. Lorsqu'en 2015, un média local interviewe les deux parents de Dolezal - tous deux blancs- , ils déclarent que leur fille est blanche et se fait passer pour une personne noire. Rachel Dolezal a alors 38 ans. Dans une interview à la NBC en 2017, elle se définit comme «trans-noire», terme qui selon elle signifie qu'elle n'est « pas née comme cela » mais que « c’est ce qu’[elle est] réellement »Elle est poursuivie pour vol et fraude sociale en mai 2018. 

Appropriation culturelle ou véritable trouble identitaire ?

"C'est triste parce que tous les gens qui tentent de me cancel ne sont même pas coréennes. En fait, les Coréens m'aiment." déclare Oli London dans cette vidéo. Pourtant, plusieurs personnalités coréennes l'accusent d'appropriation culturelle et de fétichisation, la youtubeuse Anna Lee en tête. Elle diffusait en janvier et en mars 2021 deux vidéos en expliquant que de son point de vue, selon lequel l'influenceur bénéficie de l'appropriation de la culture coréenne. Elle s'appuie sur deux des clips de ses chansons dont "heart of Korea" dans lequel il danse vêtu d'un kimono japonais sur des vidéos semblant être tirées de banques de vidéos.

Pour Anna Lee, Oli London empile plusieurs éléments qui contribuent à créer des généralités, semblant "considérer l'Asie comme une identité unique". Selon elle, "Oli London - comme tout influenceur - gagne de l'argent par sa musique, son contenu Instagram et Tik Tok. Plus le contenu est provocateur, plus il sait qu'il fera des vues, même si ce sont des haters, cela compte comme de l'engagement et c'est la seule chose qui compte sur Youtube."


À ses détracteurs, Oli London clame : "vous ne comprenez pas : j'ai été piégé dans le mauvais corps toute ma vie. Ca a été très dur ces huit dernières années, j'étais perdu, il y avait tellement de gens en ligne qui me malmenaient, se moquaient de moi, à propos de mon apparence, mon amour pour Ji-Min (Park Ji-Min, chateur du groupe coréen BTS, ndlr), mon amour pour la corée. Les gens ne comprennnent juste pas." Le 25 juin, iel tweetait : "Si vous pouvez être transexuel, vous pouvez aussi être TRANSRACIAL. Pourquoi y a-t-il un tel double standard et une telle hypocrisie avec des gens qui me critiquent d’être Coréen ? C’est la même chose que quelqu’un qui est né dans le mauvais corps et qui veut devenir homme ou femme. J’étais né dans le mauvais corps ! »

Dans sa vidéo du 21 juin Oli London estimait que "c'est une très belle chose, en 2021, vous pouvez avoir toutes ces différentes identités, nous pouvons aimer des personnes différentes librement; Ce n'est pas le cas dans d'autres pays, je voudrais dire à mes fans qui viennent d'autres pays où ce n'est pas possible de faire son coming-out en tant que non-binaire ou d'être soi-même, je voudrais vous dire d'être forts, courageux, un jour votre tour viendra."C'est aussi là qu'intervient la notion de privilège, centrale pour comprendre le débat qui oppose les soutiens aux personnes se revendiquant "transraciales" et leurs détracteurs.

Par ailleurs, le terme de transracialisme pose problème en lui-même puisqu'à l'origine, il est utilisé pour mentionner les personnes adoptées par des parents d'une race différente. Aux Etats-Unis, certains parlent d'"usurpation raciale".  Concernant le cas d'Oli London, qui ravive les dissensions entre militants, philosophes et intellectuels de tous bords, il illustre en tout cas à la perfection l'adage selon lequel il n'y a pas de mauvaise publicité.

Pour poursuivre la réflexion, on vous conseille cet article de Slate concernant le transracialisme et la transidentité.

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par Antoine Lebrun

Jean-Michel Aulas président… mais pas du foot cette fois. Le mythique ex-patron de l’Olympique Lyonnais n’a pas encore claqué sa déclaration officielle pour les municipales 2026, mais ça sent très fort le teasing de campagne. Et un nouveau sondage publié par BFM Lyon vient clairement de lui donner un petit supplément de confiance (et sûrement quelques coups de fil en coulisses).

Jean-Michel Aulas en tête si...

Selon l’étude Elabe, si la gauche et la droite partent en ordre dispersé, c’est simple : Aulas passerait devant tout le monde au premier tour avec 24% des voix, coiffant au poteau le maire écolo sortant Grégory Doucet (22%). De quoi faire suer vert les équipes municipales actuelles, déjà peu fans du personnage.

Dans les autres hypothèses (alliances à gauche ou à droite), JMA resterait quand même solidement accroché à sa place de dauphin, jamais très loin derrière Doucet. Et c’est justement là que ça devient intéressant : l’ancien président de l’OL s’impose peu à peu comme le seul capable de rassembler un centre droit éparpillé façon puzzle. Un leader "au-dessus des partis", comme aime le répéter son entourage, histoire de flatter son image de boss apaisé mais prêt à jouer des coudes.

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Les jeunes au secours de Doucet quand les anciens plébiscitent Aulas

En mode fin stratège, Aulas reste flou sur ses intentions, lâchant seulement sur X (ex-Twitter pour les anciens) : « Progressivement, un cap et un chemin se dessinent ». Traduction : attendez un peu, ça va arriver au moment opportun (probablement après Pâques, si les bruits de vestiaire sont vrais).

Reste que le sondage montre un clivage générationnel net : les jeunes votent Doucet à fond (plus de 50% chez les 18-34 ans), quand les 50 ans et plus plébiscitent largement JMA. Une vraie opposition de style entre un maire écolo un brin clivant et un capitaine d’industrie qui veut jouer les rassembleurs pragmatiques.

Bref, à Lyon, la campagne n’a même pas commencé officiellement qu’elle sent déjà la poudre et les rebondissements. Et connaissant Aulas, on n’a pas fini d’assister à un joli match à l’ancienne.


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