Toni Erdmann, chef-d'œuvre mais pas trop

undefined 31 août 2016 undefined 00h00

Louis Haeffner

Dimanche, alors que tout Nantes profitait des dernières du Voyage à Nantes, j'ai passé ma journée entière au ciné. Je sortais d'un mariage fini assez tard et dans un état lamentable, c'est donc absolument lessivé que je me pointe au ciné sans trop savoir ce que j'allais y voir. Là, chance, Toni Erdmann commence dans cinq minutes.


Première constatation : y'a quasiment que des vieux dans la salle. Est-ce par nostalgie parce que le film est allemand, ou tout simplement parce qu'il y a la clim' dans la salle ? Impossible de le savoir, j'aurais dû faire une enquête à la sortie. Ce que j'observe par contre à ce même endroit, c'est le visage quelque peu interloqué de ces mêmes personnes âgées. Visiblement ils ne savaient pas trop quoi penser du film. Ce qui, souvent, est plutôt bon signe à vrai dire, car au moins si l'on est partagé, c'est que le film sollicite en nous un minimum de réflexion, et utiliser sa matière grise, comme chacun le sait, est bon pour la longévité. J'imagine donc que j'avais affaire à des gens très intelligents, d'où cette sorte de léthargie bonhomme qui semblait s'être emparée de chacun d'eux. Moi-même, à la fin de ce film, je réfléchissais. Qu'allais-je dire de cette œuvre ? 

Je n’ai pas eu la chance de visionner le chef-d’œuvre absolu annoncé par bon nombre de mes confrères. J’ai certes vu un bon film, avec un certain nombre d'axes de lecture intéressants, une réalisation intelligente et sensible, et d’excellents acteurs, sans aucun doute, mais je ne suis pas non plus sorti de la salle avec des images plein la tête et l’envie irrépressible d’acheter un ticket pour chaque membre de ma nombreuse famille. Je crois cependant comprendre les raisons de l’enthousiasme un peu exagéré qui entoure ce film. Cette histoire de femme moderne, tellement impliquée dans son job de femme moderne qu’elle en oublie complètement d’être heureuse, et de ce père fantasque qui tente par des moyens fantasques de le lui montrer, est clairement touchante. On rit pas mal, on sourit beaucoup, on a les yeux mouillés parfois.

La légère satyre, en filigrane, de la mondialisation et - comme me le faisait judicieusement remarquer un ami allemand - du féminisme à l'allemande ouvre des pistes de réflexion intéressantes, ok. Mais ce qui fait que toute la presse crie unanimement au bijou cinématographique, à mon avis, c'est surtout la pauvreté filmique du dernier festival de Cannes. Les gars étaient tellement frustrés par la sélection cannoise que le moindre hug à un père mignon déguisé en grande bête à poils longs fut interprêté comme un sommet d'originalité cinématographique. Bon, c'est vrai que cette scène est chouette. 

En résumé, voilà un bon film, avec des tas de bonnes idées, mais rien qui ne changera votre vision du monde ou votre désir de spiritualité. On vous le conseille quand même hein, ça vaut bien onze balles.