On avait vu la bande-annonce y'a quelques mois avec des collègues, et on s'était dit que ça avait l'air vraiment chanmé et qu'on irait le voir tous ensemble. Enfin j'avais dit ça mais en vrai je flippais de ouf, je déteste les films d'horreur. Résultat je suis allé le voir tout seul. Merci les gars, qui m'achète un nouveau slip maintenant ?
Le problème avec les films d'horreur, c'est que ça fait peur, et la peur, c'est pas très agréable comme sentiment. Pourtant, y'a pas mal de monde qui semble adorer ça, et le genre connaît depuis toujours une popularité certaine. Personnellement, j'ai toujours considéré l'horreur comme un sous-genre, un moyen facile d'exploiter la naïveté du peuple en lui offrant un spectacle grossier plutôt qu'une manifestation artistique. C'est vrai quoi, avec un film d'horreur, peu importe l'histoire, peu importe la mise en scène, peu importe même le jeu des acteurs, tout ce qu'on demande, c'est d'avoir peur.
Le film d'Ari Aster, bien qu'il n'y ait absolument aucun doute sur la catégorie dans laquelle le ranger, propose pourtant une expérience cinématographique bien différente des films d'horreur classiques où l'on sursaute toutes les cinq minutes à la vue d'un corps décharné ou d'un esprit vengeur. Ici, l'angoisse est permanente, diffuse, elle s'immisce dans les moindres pores de la peau, elle tend les muscles et écarquille les yeux, elle oblige à regarder l'écran, en un mot, elle fascine. Comment ? Par des prises de vue inventives, une photographie sublime, une bande sonore toujours parfaitement calquée sur l'action, des couleurs alternant à merveille entre le glauque et l'éclatant, et une imagerie mortifère qui surprend par sa grande beauté. Oui, l'horreur, ici, est étonnamment belle à regarder.
Mais si Hérédité impressionne par la qualité et la minutie de sa mise en scène – d'ailleurs étrangement similaires au soin qu'Annie Graham met à la réalisation de ses maquettes miniatures –, ce que le métrage raconte n'est pas non plus fait pour nous rassurer. Plus que des thèmes bien connus du spiritisme ou du satanisme le plus académique, il est ici question de la famille, des secrets qui la gangrènent, de l'ambivalence des sentiments qui peuvent exister entre ses membres, de l'irrémédiabilité de la naissance. On n'échappe jamais à ses parents.
Hérédité nous rappelle donc avec beaucoup d'intelligence qu'un film d'horreur n'est pas voué à être horrible. Bien aidé par la virtuosité de sa réalisation et le talent de ses acteurs, il nous rappelle même que le cinéma est un art multiple, et que faire peur peut en être un.