En même temps, même le spectateur le moins avisé verrait un large sourire éclairer son visage bougon à la lecture d'un tel casting : Emma Stone, Willem Dafoe, Mark Ruffalo, pour ne citer qu'eux. Mais pour réunir une telle brochette de talents, il faut pouvoir compter sur le propre sien, ce que Yorgos Lanthimos semble s'être employé à faire, avec un style qui lui est très personnel, depuis quelques temps déjà.
Pauvres Créatures, un 8e long-métrage pour Yorgos Lanthimos
Dans ses films, la comédie est presque toujours satirique (The Lobster), le burlesque confine à l'horreur (Mise à mort du cerf sacré) et l'image, surtout, a cette touche d'originalité et de personnalité qui fait la marque des grands (La Favorite). Dans Pauvres Créatures, le réalisateur combine à la perfection ces trois aspects de son cinéma pour offrir un conte à la puissante portée symbolique, dont on ressort tout simplement émerveillé, mais également avec la certitude d'avoir vu quelque chose de nouveau, d'important, et d'infiniment beau.
Un scénario fantastique captivant
Bella Baxter est le fruit de l'expérimentation scientifique de son “père”, le docteur Godwin Baxter, dont elle va vite abréger le prénom en « God » — vous sentez poindre la symbolique ? Dotée d'un corps de femme et d'un cerveau de bébé, sa personnalité comme sa sexualité vont se développer à une impressionnante vitesse, rendant rapidement la propriété du docteur Baxter trop étroite pour ses envies de découverte ; Bella est consciente d'elle-même, et dès lors, son appétit pour la vie et ses plaisirs ne saura être rassasié. Grâce au chaperonnage d'un avocat mal intentionné mais qui va vite se retrouver dépassé par sa fougue, elle va voyager à travers l'Europe à bord d'un magnifique bateau de croisière, où elle rencontrera des personnages tout aussi passionnants qu'elle, avant de rentrer à Londres pour accompagner le déclin de son “père”.
C'est donc une véritable odyssée, au sens premier du terme, que va vivre Bella, nous entraînant avec elle dans son étude du monde, des hommes, des femmes, des humains, mais surtout de la vie, du premier souffle aux pires vicissitudes de l'âme humaine. Englober tout ça en un film ressemble à s'y méprendre à une mission impossible, pourtant Yorgos Lanthimos s'y attèle avec une force narrative et esthétique hors du commun, ajoutant à toute cette profondeur une légèreté dans la forme qui séduirait le plus réticent des sceptiques. En un mot, c'est du pur génie, et déjà le film de l'année.
Pauvres Créatures, de Yórgos Lánthimos
Avec Emma Stone, Willem Dafoe, Mark Ruffalo
En salles le 17 janvier