Enfin ! Après des mois et des mois d'attente, le film lauréat de la Palme d'Or sort enfin, tel un cadeau de Noël mal caché sur l'armoire du bureau de papa. D'ailleurs, comme souvent chez Kore-eda, de famille il est ici grandement question. Hop, transition dégueulasse. Le film par contre, est une petite merveille.
De nos jours, au Japon. Un père et son fils partent en expédition au supermarché. Pendant que l'un fait diversion, l'autre remplit son sac à dos de victuailles. La chorégraphie est bien rôdée, et les deux complices rentrent joyeusement chez eux. En chemin, ils découvrent une petite fille abandonnée sur un balcon, dans le froid, et l'emmènent avec eux. Accueillie dans un premier temps pour la nuit seulement, la petite va vite devenir un nouveau membre de cette famille pauvre mais heureuse, où les liens sont plus importants que ceux du sang.
Si la notion de famille semble être primordiale pour Hirokazu Kore-eda, comme en témoigne une bonne partie de sa filmographie (Après la tempête ou Tel père, tel fils pour ne citer qu'eux), elle est ici transcendée par le fait que la solidarité, l'amour et le bonheur qui lient les personnages, ne repose justement pas sur la filiation. Comme le répète à plusieurs reprises la grand-mère, la famille que l'on aime, c'est celle que l'on choisit, et la grande précarité dans laquelle vit cette famille ne peut donc en aucun cas un frein à leur bonheur. Voilà, en bref, le cadre moral et éminemment humaniste du film.
Rien de révolutionnaire donc dans ce que dit le métrage, mais une infinie tendresse dans la façon de le montrer. C'est là que Kore-eda excelle, dans cette grande délicatesse qu'il met à filmer le silence, à immiscer sa caméra dans la simplicité d'un bonheur pourtant précaire, à rendre chaque moment éternel. Il faut également souligner le travail époustoufflant effectué par le chef-opérateur sur la lumière, qui rend chaque plan, absolument chaque plan, beau comme un lever de soleil. Enfin, la musique, aussi délicate qu'à propos, achève de transformer ce film intimiste en chef-d'œuvre intemporel.
Il est difficile de s'étendre sur Une Affaire de famille, pour la bonne raison qu'un film tel que celui-là ne se commente ou ne s'analyse pas. Il se regarde, s'écoute et se vit. En jouant sur l'immédiateté des moments de grâce dont il est rempli, il contraint positivement le spectateur à profiter de chacun de ses plans, et à s'en émerveiller.
