« Œuvre immersive. » Utilisée à la pelle dans le vaste écosystème des expositions, l’expression provoque de l’urticaire, aux journalistes culturels comme aux spectateurs, qui s’attendent à investir leur corps, à mobiliser leurs sens, pour rester finalement cloisonnés dans l’observation. Une caricature que Mathieu Debay, commissaire de l’exposition Into The Light et « passionné de lumière », comme il se qualifie sobrement, a voulu dépasser.
Oui, confirme-t-il, cette nouvelle expo monumentale, en « première mondiale » à La Villette, est assurément immersive, mais c’est surtout un « projet intelligent » sur un « sujet complexe », accompagné de podcasts de savant·es (Étienne Klein, Thomas Jolly, Kumiko Kotera…) pour éclairer le parcours. Un sentiment partagé lorsque nous ressortons du hangar, après avoir déambulé sur quelques 3 000 m2 d’œuvre en œuvre, oscillant entre de nombreux sentiments parmi lesquels l’éblouissement et l’apaisement, avec toujours, en toile de fond, un nécessaire questionnement.
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Une génération d’artistes européens pour écrire la lumière
Revendiquant l’ancrage européen de l’exposition, Mathieu Debay a rassemblé 15 œuvres, individuelles ou collectives, conçues par des sculpteur·rices de lumière (Guillaume Marmin, Children of the Light), des studios (Nonotak), des réalisateur·rices artistiques (Collectif Scale) ou des plasticien·nes (Olivier Ratsi). La lumière façonne le monde, iels en sont les interprètes.
L'itinéraire, construit en cinq actes étalés sur 1h30, fait s'enchaîner salles et expériences bouleversant nos perceptions. On revient aux origines du monde avec la lumière en tant que source de vie, premier spectacle de l’humanité, pour remonter sur la façon dont l’homme a adapté cette énergie à son quotidien, l’utilisant pour magnifier l’architecture. Pénétrant ensuite dans une immense salle de spectacle – qui confirme, une nouvelle fois, le haut potentiel de la Halle de La Villette pour un projet de cette envergure –, la lumière devient un spectacle en soi, une aire de jeux à réinventer au fil des installations, des matières, de la musique qui l’accompagnent.
© Flora Gendrault
Brume, flashs et néons
Déroutant, hypnotisant et même un peu oppressant : à la sortie d’Into The Light, le panel d’adjectifs est vaste pour décrire le voyage effectué. Guillaume Marmin réussit l’exploit de reproduire un soleil visible à l’œil nu, tandis qu'Olivier Ratsi efface nos repères spatiaux dans une chambre noire embrumée. Créé en Chine en 2019, est aussi présenté pour la première fois en France Nautilus, un dispositif immobile mais dynamique du collectif Scale en collaboration avec le réalisateur Zhang Yimou.
Au fil des salles, les effets se multiplient et ne se ressemblent pas, mobilisant conjointement la vue et l’ouïe, demandant à s’asseoir, s’allonger ou rester bien droit, pour observer flashs ou néons de couleur qui s'entrêmelent. À la sortie, un peu aveuglé·es, on plane et on en redemande.
© Flora Gendrault
Into the Light
Grande Halle de La Villette
211, avenue Jean-Jaurès – 19e
Du 9 avril au 31 août 2025
Tarifs : 19,90€ adulte, 17,90€ réduit
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