Depuis 2012, le street art s’infiltre dans les recoins et endroits dissimulés du Palais de Tokyo dans le cadre des différents cycles du Lasco Project, son programme dédié aux arts urbains. Au fil du temps, des œuvres pour la plupart impressionnantes, et d’autres plus discrètes, ont orné ses murs, constituant ainsi un ensemble presque unique au monde des grands street-artists d’aujourd’hui. Pour cette septième étape, le musée présente une intervention inédite de Pablo Tomek, ainsi que le projet indoor de Philippe Baudelocque. Bluffant !
Découvrir presque 3 km de souterrains avec des interventions de street-artists talentueux, c’est ce que nous propose le Palais de Tokyo avec son Lasco Project. Pour la septième étape de ce cycle, les artistes Pablo Tomek et Philippe Baudelocque, tous deux issus du graffiti, ont été choisis pour s’exprimer dans les méandres du Palais, l'un préférant l’extérieur, l’autre l’intérieur.
©Nicolas Gzeley
Travaux Publics, l’œuvre monumentale de Pablo Tomek, se déploie sur les arches du Palais de Tokyo, en contrebas de l’avenue du Président Wilson. En descendant les vastes escaliers de la rue de la Manutention, on découvre ses peintures murales de 500 m2, à la fois abstraites et sensationnelles. Le graffeur s’est inspiré des gestes des ouvriers de rue, qui étalent sur les vitres du blanc de Meudon, une peinture à base de craie diluée dans l’eau, afin de se cacher des regards indiscrets.
« "L’ouvrier artiste peintre" partage alors, aux yeux de tous, une peinture intimement liée à son état d’esprit, à sa condition et à ses émotions au moment où il agit. (…) Sa pratique propose alors une nouvelle forme d’occupation visuelle de la ville », explique Tomek à propos de son travail. Le jeune artiste reprend ainsi le langage de la rue, et le détourne pour en faire une œuvre colorée et prodigieuse.
© Philippe Baudelocque
Il faut s’aventurer dans un escalier colossal et insoupçonné pour découvrir "- + / = +", le projet de Philippe Baudelocque. Commence alors un réel parcours initiatique. Très influencé par l’histoire de l’art pariétal, l’artiste a en effet dessiné à la craie blanche sur fond noir toute sorte d’animaux et de symboles à la fois mystérieux et désacralisés.
« Au fur et à mesure que l’on monte, il y a un chemin spirituel qui se fait », m’explique Jean de Loisy, tout en me décrivant l’œuvre. « Tout part d’une petite lumière tout en bas à l’intérieur de la matière, qui commence à se développer, l’on découvre des animaux qui ont à l’intérieur de leurs corps les territoires à travers desquels ils se développent, puis on arrive à l’Humain avec ce grand sexe féminin dans un angle comme origine du monde, pour ensuite monter vers le cosmos. » Baudelocque dénote ainsi avec cette idée que l’on a des street-artists en général, sans imaginer qu’il pourrait en fait y avoir une part de spirituel dans leur démarche artistique.
© Pablo Tomek
Car si certains en doutaient encore, le street art est bel et bien un art à part entière, comme le souligne Jean de Loisy. « Il y a 30 ans cela nous paraissait un art énervé fait par des enfants mal élevés et mal habiles, aujourd’hui c’est à l’évidence un art intense, puissant, né avec la fin du XXe siècle ; qui est incontournable et qui est devenu un langage universel, très divers, très virtuose et très réfléchi. »
Plus qu’une simple et énième démonstration d’arts urbains, le Palais de Tokyo nous montre que ce mouvement, en plus de revêtir cette dimension recherchée et revendicatrice, peut également être une ode à la spiritualité. A découvrir vite !
Lasco Project #7
Palais de Tokyo
13, av. du Président Wilson – 16e
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