Belgrade la nuit : traîner avec un crew de rebels serbes

undefined 9 novembre 2018 undefined 15h16

Rachel Thomas

Le street photographe Boogie a passé des années à éclaircir les recoins les plus sombres de la planète, prenant des portraits de baron de la drogue, de criminels et de paysages d’après-guerre. Dans ce nouveau projet, il a tourné son attention vers Belgrade Zoo - un crew de skate ayant capturé l’esprit perdu de la rébellion punk rock.

« J'ai rencontré pour la première fois les gars de l'équipe de skate de Belgrade il y a deux ou trois ans. Nous étions à une soirée en ville et l'un d'entre eux m'a reconnu. Il est venu vers moi et m'a montré un tatouage qu'il avait - un portrait de gangster - qui s'est avéré être une de mes photos. Nous sommes restés en contact après ça.

Quand je pense à la rébellion, ce qui me vient en tête est le mouvement punk rock britannique de la fin des années 70. Et quand j'ai commencé à fréquenter Belgrade Zoo, ils me faisaient penser à ça. Ils partagent la même énergie brute. Ce n’est pas tangible - je ne peux même pas l'expliquer -, c'est juste une énergie pure. Ils n’ont pas d’agenda spécifique, ils n’essayent pas de changer quoi que ce soit et il n’y a pas de motif politique. C’est la manière dont ils vivent leur vie : ils skatent, se tatouent et traînent.

Si ce crew s’en rapproche, il n’y a vraiment rien qui corresponde parfaitement à l’esprit rebelle du mouvement punk rock. Cette dose d'énergie chez les jeunes ne sera plus jamais autorisée - aucun gouvernement ne le permettrait. Car, franchement, c’est en ça que réside le vrai pouvoir.

D’un point de vue créatif, je pense que l’Internet a été contre-productif. Tout est déjà prêt, clef en main. C’est plus difficile pour les gens de trouver leur voix. Il y a tellement de choses là-dedans que c’est facile de s’y perdre et commencer à copier quelqu’un sans même s’en rendre compte. Tout est saturé. C’est dur de se déconnecter et de suivre son instinct, son propre chemin.

Une bonne chose, c’est qu’au moins, il y a de la démocratie. Tout le monde peut être photographe - tout le monde a un smartphone et peut réussir à shooter. Je ne suis pas contre, parce que la qualité va toujours en augmentant.

J’ai développé ma propre voix en sortant et en shootant. Il n’y avait pas Internet, et je n’avais pas assez d’argent pour acheter mes propres books photos, mais c’était une chance. Je faisais mon propre truc et je ne regardais pas le travail des autres.

Les gens disent qu’il y a de la noirceur dans ma photographie. C’est peut-être le cas : j’ai commencé à shooter en Serbie dans les 90’s. C’était des jours sombres dans le pays. Ça m’est sûrement resté.

Maintenant je shoote tout ce que j’ai envie de shooter. Le but n’est pas de donner aux gens ce qu’ils attendent : c’est écouter ses tripes. Tout change constamment, vous êtes changeant, votre humeur est changeante, la météo est changeante. ».

Cet article fait partie d'une série présentant des voix emblématiques et émergentes dans la photographie de rue. Lisez d'autres articles de This Is Off The Wall, un partenariat éditorial de Huck and Vans.