L'Assemblée nationale a voté dans la nuit de vendredi à samedi l'interdiction de toute forme de châtiment corporel sur les enfants. Fini de jouer avec la fessée les enfants !
La fessée. Un petit mot si anodin, avec sa consonance délicate, presque mignon. Bon ok, un peu SM aussi, dans sa version adulte en cinquante nuances. Fessée éducative, récréative, brutale, elle rougit les fesses, taquine le plaisir et fait couler les larmes. Elle squatte les box-offices, s'arroge des titres dans la presse et se tape l'incruste sur les bancs du Conseil de l'Europe. Apparemment, les députés européens n'aiment pas les fessées, tiens donc... On les écoute et on pense avoir mal entendu : la fessée serait un horrible châtiment corporel imposé aux enfants ? Cette petite tape qui ne mange pas de pain, cette menace si courante, ce graal de l'autorité parentale ? Jusqu'ici on pensait la formule magique, presque indolore. Une petite fessée, ça n'a jamais vraiment froissé ma pensée.
Selon un sondage Ifop, 70% des Français seraient opposés à son interdiction. Mais osons nous poser la question jusqu'au bout. Je reprends la définition et je lis : punition corporelle, série de coups, coups répétés, battre... Et si lever réellement la main, même sur l'arrière d'un enfant, n'était plus si anodin ? Un sentiment d'inconfort me guette. Le mot sonne plus dur, le geste se fait rude, humiliant. Culpabilisant aussi.
Derrière un sujet à l'apparence badine, la réflexion s'ouvre sur une éducation sans violence. La conscience qu'une punition corporelle, de quelque nature qu'elle soit, n'est jamais anodine.
Pour comprendre d'où vient cette initiative entérinée par l'Assemblée, il faut remonter à 2015. La France est alors épinglée par le Conseil de l'Europe parce qu'elle ne sanctionne pas de manière « suffisamment claire, contraignante et précise » les châtiments corporels sur les enfants. Les socialistes et les écologistes ont ensuite repris l'idée. Pour acter l'amendement, le code civil a dû être modifié. Il condamne désormais « tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux violences corporelles ».
Pour savoir si l'abolition de la fessée sera effective, il faudra attendre mercredi. Notons que dans les faits, cette mesure ne sera pas accompagnée de sanction pénale. L'objectif est de prévenir la maltraitance des enfants. Régler une telle évolution de conscience à coups de code civil n'est peut-être pas la plus urgente des solutions mais gageons que le débat, lui, ne fera de mal à personne.